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LE SLASHER DU MOIS : KILLER COASTER (2023)

Qui a dit que la rubrique du Slasher du mois ne se limitait qu’à des films, lorsque de savoureuses séries TV parviennent également à illustrer parfaitement le genre ? C’est le cas aujourd’hui, avec qui plus est un exemple français, qui contribue, avouons-le, à la surprise générale. Killer Coaster, dont la première saison de 8 épisodes est disponible sur la plateforme Amazon depuis quelques jours, raconte l’histoire de Sandrine Laplace, contractuelle maladroite et détective dans l’âme, déterminée à résoudre une enquête policière qu’elle infiltre incognito dans un parc d’attractions de Palavas-les-flots. Se faisant passer pour une foraine, au milieu de clans familiaux déjà bien rivaux, elle cherche à identifier un mystérieux tueur en série sévissant sur les lieux et éradiquant un à un des innocents dans le train fantôme et les allées bondées du parc.

Bienvenue à Palavas-les-flots !

La première excellente idée de cette série est de placer son intrigue dans un parc d’attractions géré par forains incapables de s’entendre entre eux, et face à la menace commune d’un assassin sévissant sur les lieux. De plus, l’action se tient à l’été 1998, en pleine Coupe du Monde, renouant avec une époque animée et haute en couleurs, à l’image des personnages dépeints ici. Alexandra Lamy joue l’excentrique et zélée héroïne s’octroyant d’éclaircir un mystère qui la dépasse, entourée de deux foraines rivales : Yvane et Carmen (respectivement interprétées par Audrey Lamy et Chloé Jouannet). Si de prime abord le casting et le traitement caricatural des personnages lorgnent de trop près avec la tendance actuelle de la comédie absurde et poussive à la Jonathan Cohen (cf La Flamme, Le Flambeau ou par extension toute autre production à laquelle il participe), les abords de comédie loufoque aux assonances belges (et/ou Canal+) sont rapidement rejoints par une véritable intrigue, ou tout du moins par une profondeur inattendue chez les personnages au fur et à mesure des épisodes. Une certaine prouesse scénaristique qui distille intelligemment l’intrigue en y mêlant l’humour, le dramatique, l’absurde et le pathétique, à défaut d’une réelle tension pourtant attendue dans une production de type slasher.

Sandrine Laplace, une pervenche qui n’a pas froid aux yeux !

Le côté décalé ne fait pas pour autant de Killer Coaster une parodie ; la série tient à raconter une histoire même si elle choisit de le faire avec humour. Et une fois le casting et le style quelque peu « familial » du produit accepté, on ne peut qu’adhérer. Loin de n’être qu’une bête réunion familiale d’habitué(e)s du format court sur petit écran (Un gars une fille et Scènes de ménage, fatalement), Killer Coaster vaut aussi pour une excellente mise en scène et de fortes attentions portées aux décors, à la lumière, et à toutes les tentatives de replonger le spectateur en juillet 98. Le créateur et réalisateur Nikola Lange ne lésine sur aucun artifice pour coller au plus près de ce que le genre expose dans ses productions américaines (bande-son typique de la fin des années 90, maîtrise des flous en arrière-plans, mouvements rythmés de la caméra, lumières au néon, SFX à l’ancienne à grands renforts d’effets en carton-pâte et maquillages authentiques sans recours au numérique). Tout est fait pour voyager dans le temps et retrouver une ambiance rétro teintée de paillettes et de barbe à papa. On est lancés dans un train fantôme, avec tous les bricolages et factices que ce voyage implique. Assumant son côté méta, de nos jours indissociable pour ne pas se prendre trop au sérieux, de multiples références cinématographiques viendront parsemer les épisodes, surtout lors de dialogues, jouant sur l’absurde des situations et l’hommage au genre.

Yvane, une foraine brute de décoffrage qui n’a pas sa langue dans sa poche !

Mais l’histoire, dans tout ça, méritait-elle une déclinaison sur une série entière ? Le format TV, recours automatique et actuellement tendance, se justifie aussi ici par le moyen de prendre le temps de poser un décor et des personnages, et de mieux jouer avec, parfois au détriment de toute logique ou crédibilité. Les marques d’humour et la catégorie « comédie » excuseront par défaut l’insuccès potentiel du résultat, qui ne tient pas à devenir une référence mais une sympathique illustration du genre, et surtout une belle tentative française bien française (Palavas-les-flots ne s’adressera pas à un public étranger comme le peut une intrigue parisienne ou marseillaise). Rien n’est fait pour y croire, et pourtant l’alchimie entre les actrices et leurs interminables déboires sanglants emportent tout sur leur passage. Certes, on n’a pas cet attachement pour les autres personnages de cette foire. Ni pour les forains, ni pour les guest stars venues prêter main forte à la distribution (de Alex Lutz en commissaire de police à Bertrand Usclat en gérant du vidéo-club en passant par Dominique Pinon en patriarche sénile). Killer Coaster, c’est un peu une version acerbe et multicolore de Scooby-Doo, surfant entre la sympathie des personnages et les tragédies flottant dans l’envers du décor. Car les morts et les effets sanglants sont là (légers, mais bien là), avec des têtes scalpées ou décapitées, des visages brûlés ou lacérés, des morts enterrés, déterrés et réenterrés, avec comme fil rouge des bâtons de barbe à papa plantés dans le gosier des victimes, comme une marque de fabrique d’un tueur dont les motivations sont finalement assez décousues, mais qui auront permis d’explorer toutes les ficelles possibles à travers ces huit épisodes. On rit plus qu’on ne tremble devant cette production, mais force est de reconnaître que la critique facile du format, sous prétexte qu’il est français et qu’il ne révolutionne pas le genre, empêcherait d’apprécier le spectacle à part entière car, bien qu’il ne soit pas à la hauteur de montagnes russes, à le mérite d’offrir 4 heures de plaisir acidulé et gourmand comme un gros sachet de guimauve. Quant à savoir si le plaisir peut se décliner sur une 2e saison, l’avenir nous le dira…

Carmen, une reine de beauté face à un danger impalpable mais bien réel…

KILLER COASTER, UNE SÉRIE DE NIKOLA LANGE, FRANCE, 2023

● les + : une série pétillante décrivant un univers coloré et plus riche qu’il n’y paraît
● les – :
un cruel manque de suspense et quelques révélations en-deçà des attentes
● meilleures scènes du film : les échanges entre le trio d’héroïnes, parsemés de dialogues parfois cinglants, souvent irrésistibles
● pires séquences du film :
les affrontements caricaturaux entre les forains, clichés à souhaits et relativement navrants

Verdict : *****
 
Vous avez aimé cette série ? Retrouvez d’autres illustrations de thrillers horrifiques décalés avec Happy Birthdead 1 & 2 ou American Psycho 2
bande annonce de Killer Coaster, série actuellement disponible sur Amazon Prime

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