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L'ANTHOLOGIE DE MICHAEL MYERS ET DE LA SAGA HALLOWEEN

LE(S) SLASHER(S) DU MOIS : HAPPY BIRTHDEAD 1 & 2 (2017 & 2019)

Soyons honnête : le slasher a fait le tour de ce qu’il était en mesure d’apporter au public. Son seul espoir de perdurer est de savoir s’inscrire dans son époque pour toucher une nouvelle génération, ou de s’adapter aux courants qui lui permettent de s’émanciper. Du thriller noir et giallos des années 70 à la relecture méta actuelle, en passant par la première veine qui tâche dans les années 80, sa relecture néo dans les années 90 et son pastiche gore façon Saw dans les années 2000, les déclinaisons auront touché bon nombre de type de productions, des confins du teen movie à la science fiction et même (et surtout) la parodie. La vraie surprise, c’est lorsqu’une de ces nouvelles productions crée la surprise en jouant sur plusieurs tableaux, sans prétention, mais avec assez de talent pour se hisser tout en haut du podium. Au milieu de congénères pas toujours très glorieux, c’est une bouffée d’air pour les spectateurs. Tout droit sorti du répertoire bien étoffé des studios Blumhouse, Happy Birthdead est de ceux-là. Retour sur le phénomène.

Très loin du stéréotype habituel (et pourtant bourré de clichés), Happy birthdead va de surprises en surprises…

Le premier ingrédient sera de développer une trame assez originale pour se dissocier des ersatz déjà bazardés à l’écran. Pour cela, rien de tel qu’une nouvelle forme de traitement de l’histoire, quitte à sortir des sentiers battus. Pour cela, nous aurons ici affaire à Tree, jeune étudiante un peu garce, qui revit sans cesse sa journée d’anniversaire sur le campus, et qui finit inéluctablement par se faire massacrer par un mystérieux tueur. À chacune de ses morts, elle se réveille, seule consciente des souvenirs de « la veille » et prête à en découdre pour percer l’identité de son sinistre assaillant. Un format inédit dans le slasher, calqué sur la comédie populaire d’Un jour sans fin (cité à juste titre dans le film), et qui permet une enquête caustique originale et bienvenue. Qu’importe si le bodycount est dès lors très faible pour un slasher, puisqu’à peu de choses près seule l’héroïne y passe dans le film. Mais pour cela, à dix reprises tout de même, et des façons les plus folles (du couteau de boucher au bang en passant par la batte de base-ball ou via des morts violentes allant de l’accident de bus à la pendaison en passant par l’explosion d’une voiture). Du grand spectacle à tous les niveaux, tant au point de la mise en scène, très animée (afin de ne pas perdre le spectateur au milieu de cette redondante histoire de boucle temporelle) et présentée sous un aspect second degré tout à fait légitime avec son intrigue. On regrettera que, passées la découverte du masque affreux du tueur et la séquence de la boîte à musique dans le tunnel du campus, la trouille ne soit pas plus au rendez-vous ; mais la comédie douce-amer de Happy Birthdead est une trop grande et franche réussite pour le piquer sur ce point.

Jessica Rothe, une scream queen déjà légendaire !

Si le film fonctionne, c’est aussi pour la qualité d’interprétation de ses acteurs, à commencer par la révélation Jessica Rothe, qui porte tout le métrage sur ses épaules avec fraîcheur et un humour ravageur. Le décalage de son traitement n’empêche pas l’empathie, car on vit et meurt avec elle au rythme de déboires sanglants emprisonnés dans son éternelle journée, tout en espérant à chaque résurrection la voir devenir une personne meilleure et trouver ainsi l’issue de sa terrible malédiction. Au reste du casting, on peut compter sur les jeunots Israel Broussard (The Bling Ring) et la chanteuse Ruby Modine. À la mise en scène, Christopher Landon (fils de feu Michael Landon, le Charles Ingalls de La petite maison dans la prairie), scénariste des opus 2 à 4 de Paranormal activity et réalisateur de l’opus The Marked Ones de la même saga, qui avait retravaillé un scénario à la base appelé Half to death, produit par Michael Bay et prévu pour Megan Fox dans le rôle titre. Confié en 2017 au producteur Jason Blum, le film se développe avec une trame revisitée et modernisée. Pour l’anecdote, c’est Tony Gardner, responsable des effets visuels sur plusieurs opus de la franchise Chucky, et créateur du masque de Ghostface de la saga Scream, qui élabore aussi le masque de bébé de Happy Birthdead. C’est à l’idée effrayante de devenir père de famille que le visuel d’un masque de bébé l’a effleuré. Après avoir testé en toute discrétion le masque en question, calqué sur celui d’un cochon, et ayant flanqué la frousse de sa vie à un technicien de surface sur les lieux, il a jugé que son idée était idéale pour un film qui mêlait comédie et frissons, et développé sur les thèmes à la fois rassurants et inquiétants d’un anniversaire qui ne peut en finir que par des coups de lames…

Une belle palette de personnages pour mener l’enquête avec l’héroïne…

L’intrigue a l’avantage de s’étirer correctement sur ses 90 minutes, grâce à un panel de personnages (et autant de suspects) agrémenté de situations à la fois typiques du genre et ici absolument savoureuses (le discret prétendant au grand cœur, la colocataire pincée, la cheffe de sororité superficielle, le prof/amant, le fou sorti de l’asile), le tout entre deux interventions d’un tueur dont chaque apparition mène à l’inéluctable mort fantaisiste et violente. La mécanique mènera à une révélation finale inattendue et plutôt intelligente, couvrant un mobile des plus rasoirs sous une énième séquence pas piquée des hannetons. Du bel ouvrage, dont les bonnes critiques presse et public, ainsi que le succès surprise au box office américain (plus de 125.000.000$ soit vingt-cinq fois la mise de départ) ont inéluctablement conduit à une suite, sortie deux ans plus tard.

Baby face, un tueur au look saisissant !

Beaucoup de slashers se sont pris les pieds dans le tapis en cherchant à apporter une explication au mythe qui a nourri le succès original, et pourtant, il est de notoriété que rien n’est jamais du au hasard, et qu’un mobile, un prétexte, une motivation doit toujours enrichir un sujet qui souvent se suffisait à lui seul. D’Halloween 6 à Scream 3, les arguments surgit de l’ombre ont plus fait défaut à l’épisode original que l’ont véritablement servi. Pour la suite d’Happy birthdead, qui aurait pu bêtement recopier son format de répétition sur un autre personnage (ce qu’il nous fait d’ailleurs croire dans sa scène d’ouverture), le film va prendre une toute autre dimension (c’est peu de le dire), en lançant à la face des spectateurs une « raison » à l’inexorable malédiction de Tree dans le premier film, en la dupliquant sur une note à 100% fantastique. La faille spatio-temporelle trouvant ici une raison d’être purement scientifique (voire geek, ne le cachons pas), le renfort à la science-fiction va prolonger le cauchemar de l’héroïne et de son entourage, en remplaçant la folle originalité du premier opus par un excessif renfort aux archétypes de cet autre schéma narratif : les dimensions parallèles. Si d’emblée le fan de slasher n’est pas perdu face à cet abracadabrantesque scénario, il sera mis sur le banc de touche en découvrant avec consternation que le tueur au couteau ne sera plus qu’une très lointaine toile de fond, remplacé par les sordides expériences à la Retour vers le futur (lui aussi nommé ouvertement dans cette suite). Si la formule peut sembler amusante, elle devient très vite lourdingue. Au point où malgré la force du film original, on est obligé d’admettre que les personnages ne sont pas assez attachants pour qu’on les voit inexorablement vivre et revivre des situations croisées sur des mondes alternatifs où les couples sont différents et où les morts sont toujours vivants et blablabla…

Prête à en découdre, encore et encore…

C’est le principal (et seul, d’ailleurs) regret à énoncer sur Happy birthdead 2 you, qui a choisi de ne pas sombrer dans la facilité, mais qui n’empêche pas le désastre d’avoir lieu. Le réalisateur Christopher Landon (et ici également scénariste) s’en défend puisque pour lui cette suite n’est pas que le fruit du succès de l’original, et prétend même avoir eu d’emblée une idée pour un troisième et hypothétique Happy deathday to us qui n’aura finalement jamais lieu, faute à des résultats au box-office en deçà des attentes pour cette séquelle. Le producteur Jason Blum avouera même avoir un temps pensé que le multivers abordé dans ce second volet pouvait peut-être se conclure en apothéose avec un croisement avec d’autres productions Blumhouse. Le recours à la comédie n’étant pas un frein au second, voire troisième, degré nécessaire sur ce nouveau chapitre. Heureusement il n’en sera rien, et seul le vrai slasher, hommage brillant à Scream nouvelle génération (plus encore que Scream 5, c’est dire !) mérite d’être retenu et mis en avant. Se suffisant totalement à lui seul, Happy birthdead s’octroie même le luxe de rester une pépite méconnue du grand public dans notre contrée, et qui fera la joie d’une soirée télé/pop corn avec l’assurance d’un divertissement à la fois maîtrisé et totalement barré. Soit ce qu’on peut attendre de mieux dans le genre. À bon entendeur…

HAPPY BIRTHDEAD (HAPPY DEATH DAY), UN FILM DE CHRISTOPHER LANDON, USA, 2017
HAPPY BIRTHDEAD 2 YOU (HAPPY DEATH DAY 2U), UN FILM DE CHRISTOPHER LANDON, USA, 2019

● les + : un véritable souffle nouveau pour le slasher (aussi fun que Scream, malgré le niveau de terreur en moins), et Jessica Rothe absolument fantastique
● les – :
l’innovation du premier film sombrant dans la bête science-fiction pour le deuxième…
● meilleures scènes du film : les mises à mort délirantes de Tree (dont le meurtre au bang sous lumières disco), et le scénario du premier film en général, totalement surprenant
● pires séquences du film :
bien que relativement précurseur dans le domaine du multivers, Happy Birthdead 2 bascule quand même dans le total n’importe quoi…

Verdict : ***** / *****

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sans oublier les tueurs fous du cinéma de genre dans Génération croquemitaines : les ancêtres et descendants de Michael Myers !

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