ZESHAPEHALLOWEEN

L'ANTHOLOGIE DE MICHAEL MYERS ET DE LA SAGA HALLOWEEN

HALLOWEEN II (1981) : LES VRAIES (MAUVAISES) BASES DE LA SAGA ?

Bien que Halloween : la nuit des masques ait posé les bases avant tout en tant que film à part entière en 1978, c’est en se déclinant trois ans plus tard avec une suite que les véritables éléments de la saga se sont mis en place. En effet, c’est Halloween II qui établit réellement les codes qui nourriront la saga pendant près de 40 ans, jusqu’au film de David Gordon Green en 2018. Ce dernier faisant le pari de dissocier Halloween d’Halloween II (deux films se déroulant la même nuit), ce que personne n’avait fait jusque-là. Halloween 20 ans après faisait suite à Halloween II, et même le remake de Rob Zombie en 2007 conservait le lien familial de Laurie et Michael Myers, élément scénaristique absent du film original. Sur de nombreux points, c’est donc bien Halloween II de Rick Rosenthal, en 1981, qui scelle le sort de Michael Myers, Laurie Strode et par extension la trame de tous les personnages gravitant autour de ce contenu. Dans son recueil Halloween : the changing shape of an iconic series, l’auteur Ernie Magnotta revient sur ce point fondamental de la saga, qui anéantit au passage l’aura fantomatique de Michael Myers tel que l’avait dépeint John Carpenter dans son film original. Une surprenante ironie quand on pense que le génial réalisateur est à l’origine du scénario de cette suite, qu’il met sous le couvert d’une nuit trop arrosée, à la recherche d’idées pour mener à bien une avide commande de producteurs plus qu’une envie personnelle de prolonger son œuvre.

La malédiction familiale, tout d’abord. Ou comment expliquer (le fallait-il vraiment, d’ailleurs ?) pourquoi Michael Myers poursuit sans relâche la jeune et jolie Laurie Strode cette nuit d’Halloween. En faisant d’elle la sœur du tueur, Carpenter apporte un objectif au croquemitaine (un mobile, pour être totalement dans l’esprit « slasher ») et dénature l’idée du Mal à l’état pur qui frappe au hasard et terrifie par excellence le tout à chacun. Bien entendu, pour que cette information ne surgisse qu’à la moitié du second film, telle un coup de théâtre kafkaïen aux oreilles du bon docteur Loomis, il fallait qui plus est indiquer que cet élément caché dans un dossier ultra-secret lorgne de près ou de loin vers le complot gouvernemental destiné à protéger on-ne-sait-qui d’on-ne-sait-quoi. Une pilule d’ores et déjà difficile à avaler et gonflant sous une épaisse couche de mystique de série B un film original à la trame hyper-simpliste qui parlait jusque-là à tout le monde. Le simple fait que Myers (bien qu’au départ un enfant de 6 ans assassinant sa sœur puis un prisonnier lunaire qui se terre dans son mutisme pendant 15 ans) devienne le frère de quelqu’un, il perd son unité centrale et spectrale au profit d’une humanité ancrée dans un univers rationnel. Ainsi, dans les épisodes 4 à 10 de la saga, Michael Myers poursuivra cette quête d’hécatombe familiale bête et bornée (sœur, nièce, neveu, petit-neveu…), jusqu’à parvenir à ce but ultime dans Halloween Resurrection et retombant suite à cela dans les méandres de l’oubli, enfoui dans les sous-sols insalubres de sa propre demeure originelle.

Le lien de parenté entre le tueur et la victime dans Halloween II dresse le premier code scénaristique constant du reste de la saga.

Ensuite, le couvert de culte païen avec l’entrée en scène du mythe de Samhain, évoqué par le Dr Loomis dans la salle de classe de Haddonfield dans le film. Cette inscription « écrite » dans le sang par Myers lui-même relierait ses méfaits à un rite mystique associé à la religion gaélique moderne sensée symboliser le passage à la période sombre de l’année (forme ancestrale de la fête d’Halloween). Cette part de magie, certes intéressante pour certains, reste une évocation vague et gratuite, quelque peu déséquilibrée, qui entrave à son tour le scénario original pour surfer sur la vague maléfique à l’origine du 31 octobre. Halloween III : le sang du sorcier, bien que développant une toute nouvelle trame, poursuivra cet aspect obscur d’Halloween avec les ressorts de sorcellerie antique et moderne et du pur surnaturel. Halloween 5 et Halloween 6 plongeront quant à eux tête la première dans les méandres de cette conspiration malfaisante à grands renforts de rites, de magie, de tatouages et de malédiction séculaire, au détriment de la simplicité originelle si efficace du Mal à l’état pur lâché dans les rues d’une petite bourgade américaine traditionnelle.

Vous prendrez bien un peu de folklore païen dans votre soupe…

Enfin, Carpenter souhaitant échapper au risque de devoir encore et encore signer de nouvelles suites à son si remarquable métrage originel, Halloween II fait mourir à l’écran le croquemitaine masqué. Et bien que les slashers voisins avaient déjà habitué leur public que le tueur revient toujours (Jason avait ouvert la marche bien avant que Myers ne renaisse de ses cendres en 1988 pour Halloween 4), le film de Rick Rosenthal, par cette vision finale du brasier emportant Michael Myers, marquait d’un point l’histoire du croquemitaine d’Haddonfield. Un fantôme (tel qu’il est dépeint dans le film original) ne meurt pas, un homme oui. Et autant il disparaissait à la fin de La nuit des masques pour s’évaporer librement dans les ruelles sombres de la ville, autant il titube dans Halloween II sous les coups de feu du Dr Loomis et de Laurie Strode avant de s’effondrer littéralement sous le poids des flammes de l’enfer. Par cette séquence de fin, Michael Myers n’est plus le Mal indestructible, mais un tueur rencontrant l’issue de sa funeste destinée. Les épisodes suivants alterneront les fins ouvertes du film original façon évaporation mystérieuse (Halloween 5), façon « le mal ne meurt jamais » (Halloween 6, Halloween Resurrection, Halloween Kills), jouant sur la passation de flambeau (Halloween 4, avec le final le plus osé et audacieux de la saga), ou faisant presque délibérément croire que nous sommes face à un véritable clap de fin pour le tueur… mais en fait non (Halloween 20 ans après, Halloween 2007, Halloween II 2009, Halloween 2018).

Un fantôme qu’on peut tuer, ça n’est rien d’autre qu’un homme…

En tout et pour tout, et bien que le prolongement sans fin de la saga ait permis la longévité de celle-ci à travers les années, la saga Halloween a construit ses fondamentaux sur des éléments plus issus d’Halloween II que du film original. Plus chargé en éléments à exploiter, le film de Rick Rosenthal a construit la légende de Michael Myers sous l’égide d’une malédiction familiale parsemée d’incrustations mystiques désolantes, et à la force originellement indestructible partiellement dénaturée par la possibilité d’être finalement vaincue. John Carpenter étant à l’origine des deux versants de la personnalité d’abord purement fantomatique puis plus humainement pertinente de Michael Myers, le choix est donné au public d’aduler le film original comme base des fondamentaux, en œuvre unique, ou par la déclinaison multiple des autres facettes que n’a pas fini de nous présenter l’horrible tueur masqué d’Haddonfield.

(sources : Halloween : the changing shape of an iconic series)

Au Suivant Poste

Précedent Poste

Poster un Commentaire

cinq × 5 =

© 2024 ZESHAPEHALLOWEEN

Thème par Anders Norén