Dans Halloween 20 ans après, le personnage de Norma, la secrétaire de Keri Tate (Jamie Lee Curtis) est incarné par Janet Leigh, la mère de l’actrice. Des retrouvailles contribuant à l’esprit nostalgique qui englobe l’ensemble du film. En 1978, John Carpenter avait choisi Jamie Lee Curtis pour le rôle principal parce que celle-ci était justement la fille de Janet Leigh, l’éternelle Marion Crane, victime du meurtre culte sous la douche de Psychose. Pour l’écriture de son script, John Carpenter n’a jamais caché s’être référencé au film d’Alfred Hitchcock. Les deux femmes avaient déjà partagé l’affiche de Fog du même Carpenter, mais c’est bien dans Halloween 20 ans après que la magie de leurs retrouvailles opère avec émotion. À noter que le personnage devait s’appeler Lynda, parce que le rôle fut d’abord envisagé pour P.J. Soles (qui jouait Lynda, l’une des meilleures amies de Laurie dans Halloween, la nuit des masques), mais l’actrice ne souhaitait pas apparaître sous les traits d’un autre personnage. Attribué à Janet Leigh, le personnage devient alors Norma, en référence à Norman Bates, le déséquilibré de Psychose). Sans oublier la séquence durant laquelle Norma quitte le campus, approchant une auto similaire à celle que son personnage dans Psychose conduit en direction du motel Bates. Pour accentuer l’hommage, les partitions du compositeur John Ottman sur H20 allient les notes du thème du film de Hitchcock. Une scène d’à peine une minute trente, qui regorge encore de références, notamment à l’Halloween original via la reprise d’une célèbre tirade du shérif Brackett (« It’s Halloween, everyone’s entitled to one good scare« ), mais reflétant également et surtout une certaine douceur et accalmie après les relations tumultueuses entre Jamie Lee Curtis et ses parents durant plusieurs années de leurs vies. Pour certains fans et pour Jamie Lee Curtis elle-même, le au revoir de Norma à Keri dans le film est également considéré comme des adieux de Janet Leigh au cinéma, Halloween 20 ans après s‘étant avéré être le dernier film tourné du vivant de l’actrice, disparue en octobre 2004.
Jamie Lee Curtis étant la fille de Janet Leigh (Bye-bye Birdie, La soif du mal) et Tony Curtis (Spartacus, Certains l’aiment chaud), tous deux d’immenses stars hollywoodiennes, tout n’a pas toujours été rose entre la mère et la fille. Notamment à cause du cadre des frasques et scandales relatifs à l’envers du décor du monde du cinéma des années 50 et 60, remplis de soirées mondaines et de grands moments de solitude. Janet Leigh et Tony Curtis ont toujours eu une relation difficile, malgré une image de couple puissant à Hollywood, surfant sur leurs carrières respectives irréprochables. Le haut tempérament et l’indépendance de Janet Leigh mêlés à la jalousie maladive de Tony Curtis ont très vite brouillé la passion qui animait les deux êtres lors de leur rencontre en 1950 et leur mariage l’année suivante. Jamie Lee Curtis l’indiquera par la suite : ses parents ont eu leur deux enfants, Kelly et elle-même, dans l’intention de reconsolider leur couple. Ce qui n’a malheureusement pas fonctionné. « Quand nous sommes arrivées, ma sœur Kelly et moi, le lien entre mes parents s’était détérioré précipitamment à mesure que leur célébrité grandissait. Et comme n’importe quel autre bébé ‘sauve-mariage’, j’ai échoué. Mes parents se sont détesté toute ma vie. J’ai été dans une maison de haine ». Le divorce de Janet et Tony Curtis en 1962 ne signe en effet pas la fin des hostilités. C’est dans un climat tendu que Jamie Lee Curtis démarre sa vie, de son enfance à ses premiers rôles, bénéficiant de la notoriété de ses parents tout en en subissant la comparaison.
Bien qu’elle ait été engagée par John Carpenter car elle était la fille de la célèbre victime dans Psychose, Jamie Lee Curtis accède à une véritable identité lorsque le succès de Halloween retentit dès la fin de l’année 1978, provoquant instantanément une rupture sur la malédiction familiale qui s’empare généralement des « enfants de… ». Après ses débuts dans le registre horrifique, elle s’empare du succès mondial avec Un poisson nommé Wanda et la route de plusieurs métrages cultes jusqu’à la fin des années 80. C’est alors que l’actrice se voit prescrire une première fois des opiacés après une chirurgie plastique mineure « pour ses yeux gonflés héréditaires ». Une opération somme toute standard qui développe chez Jamie Lee Curtis une dépendance aux anti-douleurs. Ce besoin insatiable prendra des proportions importantes pendant près de 10 ans, période pendant laquelle elle cachera à tous son addiction aux médicaments, tout en allant jusqu’à voler des anti-douleurs dans son entourage (dont sa sœur Kelly qui découvre alors la vérité), avant de révéler à son mari et à quelques membres de sa famille son travers, avec l’intention de guérir de sa dépendance en rejoignant un établissement spécialisé en 1999 : « Je brise le cycle qui a fondamentalement détruit la vie de générations dans ma famille, déclare-t-elle, être sobre reste mon plus grand accomplissement… plus grand que mon mari, plus grand que mes deux enfants, et plus grand que n’importe quel travail, succès ou échec. N’importe quoi ». En effet, avant elle, d’autres membres de sa famille ont connu des problèmes similaires. Son père, l’acteur Tony Curtis était dépendant à l’alcool, la cocaïne et l’héroïne tandis que son demi-frère Nicolas Curtis est mort d’une overdose d’héroïne en 1994.
C’est suite à cette libération que Jamie Lee Curtis se rapproche de sa mère, et noue une connivence qui manquait cruellement à leur existence. Complices à l’écran dans Fog, Halloween 20 ans après, et dès 1979 dans un épisode de La Croisière s’amuse, elles trouvent toutes les deux un équilibre dans leur vie familiale, et ce jusqu’au décès de Janet Leigh en 2004. Depuis, Jamie Lee Curtis multiplie les références et hommages à sa mère, par des photos sur son compte Instagram, ou lors de cérémonies publiques. En 2021, à l’avant-première d’Halloween Kills, elle apparaît vêtue comme sa mère dans son célèbre rôle de Marion Crane de Psychose. Et en 2015 déjà, dans la série télévisée Scream Queens, Jamie Lee Curtis rejouait la séquence de la douche du film d’Alfred Hitchcock, comme un ultime hommage au parcours de Janet Leigh et une véritable prouesse d’actrice de cinéma.
(sources : IMDb, huffingtonpost, allociné, arte, grunge.com, amomama.fr, Paris Match)