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L'ANTHOLOGIE DE MICHAEL MYERS ET DE LA SAGA HALLOWEEN

GÉNÉRATION CROQUEMITAINES : MATT CORDELL (TRILOGIE MANIAC COP)

Nous sommes à la fin des années 80. Le slasher a dix ans. Et il était grand temps qu’un croquemitaine vienne flanquer un grand coup de matraque dans un genre bien trop porté sur la redite. William Lustig, réalisateur de Maniac, s’en charge avec brio en créant un croquemitaine aussi mémorable qu’original : Matt Cordell, un ancien policier envoyé en prison et passé pour mort après une terrible agression commise par ses codétenus (des malfrats qu’il a lui-même arrêté), revient en ville en perpétrant des crimes atroces. Rien ne serait bien palpitant s’il ne commettait ses méfaits habillé en policier, provoquant une panique sans précédent dans les sombres quartiers de New York. Les autorités ont beaucoup de mal à mettre la main sur l’assassin, tout en tentant d’apaiser les habitants de la ville qui commencent à se faire justice eux-mêmes en tuant les flics qu’ils prennent pour le tueur.

Cette trame hors du commun apporte beaucoup de fraîcheur dans le registre du slasher. Maniac Cop (aka Le flic de l’enfer au Québec) se présente même comme un film policier d’action rondement bien mené. Son casting (Tom Halloween III Atkins et Bruce Evil Dead Campbell en tête, face à un Robert Z’Dar totalement habité par son rôle) et sa réalisation le rangent dans la catégorie série B avec mention trois étoiles pour ne pas avoir sombré dans la facilité. Car l’intrigue prend la part belle et fait de l’ensemble un vrai thriller. Un film policier qui donne la priorité à l’action, en accueillant dans son équipe le novice Spiro Razatto qui a fini par devenir un ténor en son genre (jusqu’aux récents Kong : Skull Island, Fast & Furious 7 et Captain America : Civil War, par exemple) en cascadeur de choc, et doublure de Bruce Campbell sur le premier film de la trilogie pour laquelle il fera office. L’humour n’est pas exclu, et intervient même de manière très inattendue (le meurtre dans le béton frais par exemple). Matt Cordell agit dans l’ombre, mais se retrouve toujours où il faut pour frapper là où ça fait mal. Face à cette impressionnante machine à tuer, personne n’est à l’abri, et le film réservera de nombreuses surprises jusqu’à son générique. Pourtant, malgré toutes ses qualités, Maniac Cop n’a pas eu un grand succès à sa sortie. Ce n’est qu’avec les années, et notamment grâce à une séquelle aux qualités discutables, que la notoriété de Matt Cordell commence à s’intensifier. Il faut dire que c’est dans Maniac Cop 2 que le tueur commence réellement à endosser un tempérament typique du croquemitaine, subissant une transformation physique digne d’un Jason Voorhees dans Vendredi 13 chapitre 8, avec la notion de « l’indéniable retour » et de la revanche post-mortem sur les héros du film original (règle ingrate du slasher movie).

Une surprise certes, mais une déception malgré tout, car la façon avec laquelle les personnages phares du premier opus sont éradiqués dans la première partie de la séquelle relève de la facilité, surtout que les nouveaux personnages sont loin d’avoir la fraîcheur et le talent de leurs prédécesseurs. Robert Davi (Permis de tuer) se charge de reprendre la casquette du bon flic, tandis que Leo Rossi (Halloween II) joue un insupportable serial killer et violeur complètement émerveillé par Cordell. Si l’histoire se tient (Cordell veut cette fois se venger des responsables de son arrestation et des prisonniers qui l’ont défiguré), on ne comprend pas pourquoi le tueur a attendu cette séquelle pour être motivé par un but aussi évident. Surtout que ses agissements ont toujours été confus et animés par une folie furieuse plutôt lambda et dès lors beaucoup plus inquiétante. Mais ces accidents scénaristiques et les mauvais choix de casting seront rattrapés par des séquences d’action pimentées et savoureuses (la voiture sans chauffeur lancée à toute allure avec une jeune thérapeute menottée au volant, l’attaque de la prison avec un bourreau en flammes, aveuglé par sa démence). Le film se regarde sans déplaisir, même si nous sommes assez loin de retrouver la pêche du film original. Ce dernier, qui a eu le temps de se faire une réputation à l’export, endosse de plein pied son statut de culte avec cette suite qui désire explorer les sombres desseins de son personnage, toujours interprété par l’immense Robert Z’dar.

Un visage qu’on n’est pas prêt d’oublier…

L’interprète de Matt Cordell, de son vrai nom Robert J. Zdarsky, a été repéré complètement par hasard par le réalisateur William Lustig lors d’un visionnage d’une petite série B dans laquelle il jouait un rôle déjà musclé (The night stalker, de Max Kleven, 1986). L’acteur, d’origine lituanienne et ironiquement officier de police de formation, est atteint de chérubisme, une maladie génétique fibro-osseuse provoquant l‘élargissement des mâchoires. Cette caractéristique physique lui permit toutefois de se frayer un chemin à Hollywood avec la trilogie Maniac Cop mais également dans Tango & Cash et de nombreuses petites productions horrifiques jusqu’à sa mort tragique en 2015 suite à une crise cardiaque survenue lors d’une convention de fans. Ici, l’acteur s’investit au point d’habiter son personnage et endosser le costume comme rarement vu à l’écran, attisant ainsi le phénomène d’attraction/répulsion d’un tueur implacable et glacial qui a vécu une expérience atroce et pour lequel le spectateur ne peut s’empêcher d’éprouver finalement une profonde peine. Il révélera « Il est important pour un méchant d’être aussi menaçant que possible, que ce soit physiquement, mentalement ou émotionnellement. Peu importe comment vous le faites. Si vous combinez les trois, alors vous avez le méchant ultime. »

Maniac Cop 3 descendra malheureusement encore d’un cran avec cette fois un manque cruel d’idées et une accumulation de clichés poussifs, même si le synopsis de départ n’était pas mauvais (Matt Cordell revient d’outre-tombe pour venger une flic dans le coma accusée d’avoir tué des innocents lors d’une prise d’otages) et que le croquemitaine retrouve un peu la forme en perpétrant des meurtres particulièrement salaces (notamment celui du docteur interprété par Robert Forster). Malheureusement, nous farcir des rites vaudou pour justifier le retour d’un tueur devenu un monstre de Frankenstein se cherchant une fiancée, c’est assez dur à digérer, si ce n’est en tous les cas très malvenu. En trois films, le croquemitaine est devenu l’ombre de lui-même, à la limite de la caricature. Il faut dire que la situation n’ pas permis la mise en chantier de ce troisième opus dans des conditions optimales. La franchise ayant changé de mains, les nouveaux producteurs rappellent le duo Cohen/Lustig mais tranchent au vif beaucoup des idées envisagées pour ce film (dont le refus de donner le statut du nouveau héros à un acteur noir). Larry Cohen mettra alors volontairement énormément de temps à remettre ses esquisses de scénario à l’équipe, laissant à William Lustig la difficulté de gérer son film dans un timing ultra-serré, l’obligeant à écourter le tournage et les séquences au point de livrer un film d’à peine 51 minutes (soit la durée légale exigée). Le réalisateur Joel Soisson (futur réalisateur de plusieurs sous-produits de Dimension, comme Children of the corn : genesis, ou les suites de Dracula, Prophecy et Pulse) est sommé d’intervenir pour combler les brèches, mais le recours à des scènes de Maniac Cop 2 ne suffiront pas à sauver les meubles. C’est malheureusement la raison pour laquelle Maniac Cop 3 baissera le rideau sur le personnage de Matt Cordell. Une rumeur de remake intervient régulièrement, proposant à William Lustig de renouer avec la réalisation. Mais celui-ci, malgré une tentative proche de Maniac Cop avec Uncle Sam en 1996, et qui semble avoir posé sa caméra depuis près de 20 ans, n’a pas non plus l’air de croire en le retour de Matt Cordell sous quelque forme que ce soit. À noter que dès 1989, soit un an après la sortie de Maniac Cop, un copycat de sombre facture a tenté d’envahir les écrans télévisés avec une trame très proche dans Psycho Cop (réalisé par Wallace Potts), qui a tout de même eu droit à une suite en 1993.

La trilogie Maniac Cop de William Lustig, palmarès d’affiches…

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