Décliné à toutes les sauces, le slasher movie a écumé les possibilités les plus variées pour mettre en scène un croquemitaine qui marque les esprits. Peu d’entre eux ont réussi leur coups, espérant réitérer le succès marquant d’un Halloween ou d’un Vendredi 13. Puisque la panoplie du tueur faisait partie intégrante de ce qui distinguait un slasher d’un autre, les tueurs ont revêtu tout ce qui leur tombait sous la main (sac à patates, cagoule, grand ciré noir, masque d’escrime) jusqu‘à des déguisements sacrilèges de mythes sociaux (Père Noël, Cupidon, un prêtre). Par déclinaison, et puisque toutes les dates marquantes du calendrier ont été détournées à profit sanguinaire, le slasher movie a lié les mythes du calendrier à ses tueurs psychopathes pour en venir à matérialiser les légendes et étoffer son panel fantastique. Aujourd’hui, c’est le Saint-Nicolas qui nous propose une nouvelle déclinaison.

Très populaire en Belgique et aux Pays-Bas, au même titre que le Père Noël dans le reste du monde, Saint-Nicolas est le patron des écoliers. Dès lors, le 5 décembre, les enfants reçoivent des oranges, des spéculos et du chocolat. Selon la légende, le Saint-Nicolas avait accompli le miracle de ressusciter les trois enfants qui avaient été massacrés par un boucher. Ce mythe glorieux lié à la religion catholique devait s’inspirer d’une autre trame pour devenir le film d’horreur signé Dick Maas (Amsterdamned, L’Ascenseur), sorti en 2010. C’est pourquoi le réalisateur inverse tout simplement le procédé en faisant de Saint-Nicolas un bourreau qui éradique tous ceux qui ne lui offrent pas des cadeaux. Le film fera même polémique à sa sortie puisqu’il prétend que les catholiques ont inventé le mythe de l’évêque de Myre (l’évêque chrétien qui fut surnommé Saint-Nicolas) pour excuser la barbarie de l’être qui est réellement à l’origine du mythe.

Décimé par le feu à bord de son bateau après une énième rafle sanglante en 1492, Saint-Nicolas revient tous les 42 ans les soirs de pleine lune du 5 décembre, plus vengeur que jamais, cette fois dans un Amsterdam moderne mais non dénué des clichés habituels de ce genre de films : les nénettes adeptes du sexe, les policiers pompeux, les situations stéréotypées telles que le déployé de commando… Mais le film met l’accent sur des effets spéciaux et des maquillages époustouflants, et aussi sur l’action, notamment sur les scènes surréalistes d’un Père Fouras courant à cheval sur les toits de la ville. L’autre mérite du métrage est de ne pas lier gratuitement le croquemitaine à une victime potentielle, féminine qui plus est. Ici, le tueur frappe dans le tas tout ce qui bouge. Il n’a donc pas besoin de mobile, puisque, comme la créature de Jeepers Creepers ou Darkness Falls, il n’a droit qu’à une nuit d’horreur toutes les perpettes les alouettes. Une nuit qu’il tient à mettre à profit pour éradiquer un maximum de personnes, aidé par ses anciens fidèles sanguinaires, armés jusqu’aux dents. Des décapitations, des démembrements, des faucilles plantées dans des crânes, des policiers écrasés par un cheval, des enfants aspirés dans les cheminées… personne n’est épargné.

Saint de Dick Maas n’a donc plus grand-chose de bien proche d’un film minimaliste comme Halloween, et le Saint-Nicolas n’est pas un tueur masqué comme Michael Myers, mais les procédés de ce type de films sont incontestablement inspirés des slasher movies. Pour preuve, certaines sagas en mal de trames crédibles finiront par opter pour cette allure fantasmagorique (Vendredi 13, Souviens-toi l’été dernier, Douce nuit sanglante nuit, Le bal de l’horreur). Paré d’une grosse part d’humour (parfois malvenue, il faut l’avouer), Saint serait le parfait alliage entre Fog, La Momie, Sleepy Hollow et Darkness Falls. Soit un mélange de mythes ancestraux, d’horreur grand guignol, d’action pure et d’humour décalé. À noter qu’à sa sortie en 2010, un peu à la manière de Douce nuit, sanglante nuit en son temps, le film a choqué une partie de la communauté, s’offusquant de voir l’image du Saint-Nicolas ainsi bafouée via la placardage d’affiches dans tout Amsterdam. Attaqué en justice pour outrage aux bonnes mœurs et au nom de leurs enfants innocents, Dick Maas s’est défendu en indiquant que si les parents pouvaient faire croire en l’existence du Saint-Nicolas à leurs enfants, alors ils avaient aussi le pouvoir de leur expliquer que le Saint-Nicolas du film n’était pas le vrai. La justice a finalement donné raison au réalisateur et a rejeté la plainte. Le film, quant à lui, se regarde donc sans déplaisir, mais on lui reprochera son final bâclé et son allure soudoyée qui ne va pas au bout des choses. Tant pis, le spectacle reste entier et répondra aux attentes des adeptes de créatures fantastiques vengeresses ayant la main lourde sur l’hémoglobine.
