Il n’est pas habituel pour un tueur de slasher movies de s’en prendre aux animaux. À cela, Michael Myers peut être une exception, avec un palmarès de victimes canines important dans la saga. Dès le premier film, Myers tue deux chiens. Le premier (non visible à l’écran, mais exposé plus tard dans l’une des séquences de flash back d’Halloween Kills), découvert par le shérif Brackett et le Dr Loomis dans l’ancienne demeure du tueur. Le second, Lester, le berger allemand d’Annie et du shérif, que Myers étrangle afin qu’il n’attire pas l’attention sur sa présence autour de la maison.
Malgré le très petit budget de Halloween, en 1978, John Carpenter avait le souci du détail et tenait à la crédibilité de tous les éléments mis à l’image, aussi a-t-il eu recours à un maître chien spécialiste pour tourner la séquence où on devine que le tueur étrangle l’animal. Pour le tournage de cette séquence, aidée d’un effet sonore glaçant, le chien se laissait glisser le long du corps de son maître, rendant l’illusion parfaite pour le film en quelques secondes.
Bien qu’aboyé par un chien féroce menaçant de donner l’alerte dans l’ouverture d’Halloween II, Myers attendra les quatrième et cinquième opus pour frapper à nouveau de malheureux toutous. Dans Halloween 4, la famille Carruthers, qui a recueilli la petite Jamie, compte dans la famille la brave et gentille Sundae, labrador beige qui porte tout son dévolu et son affection à la petite fille. Elle sera la triste victime du croquemitaine lorsque celui-ci entrera dans la maison pour s’attaquer à la petite fille. Durant cette séquence, il ne trouvera que d’anciennes photos de Laurie Strode dans le placard de la chambre de Jamie. C’est à cet endroit que le corps de Sundae sera plus tard découvert par Loomis et le shérif Meeker.
Un an plus tard, toujours en chasse de Jamie, Michael Myers prend d’abord sa revanche sur Rachel Carruthers, qui a stoppé sa route dans le film précédent. La maison est cette fois protégée par le doberman Max, un chien braillard beaucoup moins accueillant que Sundae. Habitué à défendre son territoire de façon tonitruante, Max est toutefois affectueux avec l’entourage qu’il connaît bien, notamment lorsque la virevoltante Tina Williams vient rendre visite à ses amies. Tentant d’ameuter Rachel de la présence inopinée du tueur dans les parages, Max ne sera pas pris au sérieux par Rachel, au grand damne des deux êtres qui seront l’un comme l’autre les victimes du monstre. Max sera pendu au grenier, aux côtés des corps sans vie des policiers et de Rachel, lors d’une séquence cauchemardesque pour la petite Jamie, spectatrice de ce sinistre mausolée.
Dans Halloween 5, le réalisateur Dominique Othenin-Girard a privilégié la mise en scène stylistique du métrage (notamment par le jeu des ombres et des lumières), plutôt que les effets visuels, parfois grossiers, bien que réalisés par l’équipe de Greg Nicotero (Le jour des morts-vivants, Land of the dead, The walking dead). Le cadavre de Max dans le grenier, une assez vulgaire peluche filmée en très gros plan, le prouve notamment. Max sera d’ailleurs la seule victime animale de Myers qui aura droit à une mise en scène, comme le fait parfois le tueur (Bob suspendu au mur dans Halloween, Barry Sims accroché au sommet d’un arbre dans Halloween 6, Sarah transformée en suspension dans Halloween H20), alors que les autres cadavres d’animaux sont en général abandonnés sur le sol, ou dévorés sauvagement.
Rob Zombie ne passe à côté d’aucune occasion de rendre une séquence malaisante pour le spectateur. N’en déplaise à ses détracteurs, rien ne sera épargné à l’écran pour le tournage de ses deux films de la saga, surtout le deuxième opus réalisé en 2009, et pour lequel il a eu totale carte blanche de la part des producteurs. Mais dans le remake de 2007 déjà, le sadisme du jeune Myers se présente avec les photos qu’il prend d’animaux morts, dont des chiens, même s’il n’est pas évident qu’il soit l’auteur de ces morts. Et c’est dans Halloween II que Myers livrera ses plus vils aspects, lorsqu’il est agressé par trois membres de la famille Benny qui l’ont trouvé dans leur champ de maïs. Si le croquemitaine ne tarde pas, et avec une grande facilité, à retourner la situation en éradiquant brutalement les trois assaillants, il se livre ensuite à un acte odieux en tuant leur chien, resté enfermé dans une cage à l’arrière du truck. L’animal, baptisé Ivan, n’aura aucune chance de s’en sortir, et sera même dévoré par un Myers définitivement relégué au rang le plus primaire de la chaîne alimentaire. Jusque-là, la cruauté qui rythmait les métrages sur ce point, en laissant supposer que le tueur se nourrissait d’animaux (du chien dans le film original aux rats dans Halloween Resurrection), n’était que subjective. Il suffisait de compter sur la cruauté latente de Rob Zombie pour obliger le public à assister à ce spectacle répugnant sans autre forme de procès.
Enfin, Halloween Kills revient donc sur le cadavre du chien découvert par Loomis et Brackett dans le premier film. La séquence hors champ du métrage original trouve donc un plan large dans celui de 2021, grâce à la séquence de flash-back exposant les faits se déroulant plus tard durant cette nuit du 31 octobre 1978. La chienne, baptisée Olivia, est la première marque de la cruauté animale de Myers dans le film original et dans la saga. L’intention de John Carpenter, même en ne montrant pas l’animal mais en jouant sur la suggestion, était de toucher et émouvoir le public puis de l’effrayer, en mettant en lumière la froideur et la détermination du croquemitaine, que rien ni personne n’est en mesure d’attendrir. Myers devait être aux yeux de tous l’incarnation de cette force malfaisante, impassible et meurtrière. En des mots plus simples : le Mal à l’état pur.