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L'ANTHOLOGIE DE MICHAEL MYERS ET DE LA SAGA HALLOWEEN

HALLOWEEN II (2009) : CRITIQUE EXCLUSIVE

Alors qu’il avait juré qu’on ne l’y reprendra plus, Rob Zombie décide finalement de réaliser la suite de son propre remake. La seule condition exigée auprès des studios a été d’avoir carte blanche sur la destinée de Michael Myers et des autres personnages. Le remake d’Halloween avait déjà sacrément ébranlé la saga originale, mais restait dans l’ombre de son modèle signé John Carpenter, aussi sa suite allait donc pouvoir prendre son envol. L’annonce que ce soit Rob Zombie qui en tienne les rennes était donc une bonne nouvelle, l’homme pouvant aller au bout de ses idées, libéré du poids des producteurs et des limitations dues à tout remake qui se respecte. Car Halloween II n’est pas un remake du film homonyme de Rick Rosenthal de 1981. Certes la première séquence se déroule dans un hôpital, mais elle ne fait qu’expédier ce qui était davantage voulu comme la transition entre le remake et sa suite et non comme un clin d’œil à l’Halloween II original. D’ailleurs, cette séquence, présentée comme un rêve long et récurent de l’héroïne, est le premier bémol de l’équilibre d’Halloween II. Quelle suite de slasher n’a jamais eu recours au rêve pour faire transition facile d’un métrage à l’autre ? L’idée n’est plus toute neuve. Et à cela, il s’agit presque ici d’une déception, tant le final du remake méritait un peu plus qu’un rêve pour mettre sa suite sur les rails. Finalement, aucune explication ne sera faite sur la balle tirée par Laurie sur Myers. Le retour de ce dernier (bien que superbement mis en scène), ne casse pas des briques et relève de la règle élémentaire du slasher qui dit que « le tueur revient toujours ». La résurrection de Myers dans Halloween II garantit donc que le croquemitaine revient et pourra revenir encore et encore, quoi qu’il arrive.

Laurie Strode continue son chemin de croix, jusque dans ses rêves…

Rob Zombie n’a eu aucune contrainte de la part des producteurs lors de l’écriture du scénario d’Halloween II, ni dans la réunion du casting, ni durant le tournage. Si la version salles diffère de la version dite Producer’s Cut, Rob Zombie n‘échappera en aucun cas à une critique qui fait valser ses efforts effectués sur le premier opus. Car ce qui avait tant choqué les fans dans le remake d’Halloween en 2007 était la façon dont le réalisateur s’entêtait à rendre Myers humain, via une mise en lumière de sa jeunesse et de son emprisonnement. Rob Zombie transformait le fantôme de Carpenter en un être brisé mais surhumain cherchant pour on-ne-sait-quelle-raison la trace de sa jeune sœur. Dans Halloween II, Rob Zombie accentue ce qui liait Michael à sa mère via une allégorie étrange sur le mythe du cheval blanc, consolidant ainsi la trame dramatique et œdipienne du croquemitaine, mais dévastant toute la mythologie étalée dans le film précédent. Car cette suite tranche l’humanité de Myers et tout ce qui le rendait concret dans Halloween pour faire de lui un pantin sans âme sous l’emprise d’un revenant dont les mobiles sont aussi flous que ses apparitions sont récurrentes. C’est donc avec une grande amertume qu’on assiste à la nouvelle épopée de Michael Myers à Haddonfield. Le film démarre par un rêve, et se prolonge comme un vilain cauchemar dont la fin sera forcément décevante, tant ce genre de combat familial post-mortem ne peut trouver le repos. La mise en abime est donc évidente. Et elle sera même fatale, vu le traitement fait sur les autres personnages du film.

Entre fantasmes et réalité, Halloween II plonge tête baissée dans l’allégorie…

Deux ans après les événements du premier film (la version française prétend d’ailleurs qu’Halloween II se déroule un an après le premier film, mais c’est une erreur), Laurie est un être anéanti qui ne parvient pas à se remettre du drame qui l’a frappé. Ses chances de salut se résument en le soutien de son amie survivante Annie et le shériff Brackett qui l’a recueilli dans leur foyer, de ses séances chez sa psychiatre Barbara Collier, et de la facétie de ses deux nouvelles amies Mya et Harley. Pourtant, Laurie n’arrive pas à surmonter ses peurs. Sa psychiatre s’appuie sur le fait que le corps de Michael Myers n’a jamais été retrouvé, ce qui empêcherait l’esprit de Laurie de faire le deuil de cette aventure. Mais l’explication est ailleurs, et c’est l’une des excellentes idées étalées dans Halloween II. Rob Zombie a su revoir la chronologie des éléments construisant le personnage de Laurie Strode dans la saga originale en apportant une nouvelle surprise à sa re-vision de la saga : dans une grande partie d’Halloween II, Laurie ignore encore qu’elle est la petite sœur de l’homme qui avait tenté de la tuer deux ans auparavant. Le shériff Brackett, très impliqué dans la destinée de la jeune fille (une totale liberté prise par le réalisateur sur le premier film), fait toujours en sorte de garder le secret afin de préserver l’équilibre mental de Laurie. Mais celle-ci va accidentellement découvrir la vérité en lisant le dernier recueil édité par Sam Loomis. L‘autre surprise flanquée par le réalisateur dans cette suite reste l’évolution des personnages qui ont survécu au premier opus. Surprises bonnes ou mauvaises, à évaluer selon le personnage, et selon le filtre de patience du spectateur. Laurie est devenue une junkie tatouée et dépravée qui enchaîne les séquences d’émotions enfantines à celle d‘une désolation presque pitoyable aux yeux du spectateur. Annie est au centre de ce qui distingue le film dans sa version salles du film dans sa version Producer’s Cut : dans le premier montage elle reste une amie impliquée et dévouée au sort de Laurie ; dans le second elle tente d’échapper à ce fardeau qui l’empêche de se construire tout en gardant une tendresse infinie pour son amie, au point toutefois de devenir un obstacle majeur à la guérison de Laurie. Le shériff Brackett reste l’homme qui n’a d’égale à son bon cœur que la haine qu’il voue à Loomis. Ce dernier est, contre toute attente, devenu un personnage avide et détestable, prétentieux et jouant sur le sort des victimes du carnage d’Haddonfield en faisant fortune sur leur sinistre mémoire. Enfin, Michael Myers, pour ceux qui l’auraient oublié, marche tranquillement mais sûrement vers Haddonfield, s’arrêtant parfois en chemin pour suivre les directives de sa défunte mère (bonjour, Vendredi 13 !) ou pour étoffer son tableau de chasse lors de séquences de meurtres d’une barbarie rarement vue à l’écran. Sa relation avec Deborah Myers est certes une belle façon d’accentuer l’amour mère-fils, mais fragilise la crédibilité et la force psychique de Michael Myers.

Brad Dourif, l’un des rares acteurs à tirer son épingle du jeu dans Halloween II

Tous les frissons provoqués par les images de Myers encapuchonné comme un sans-abri n’étaient finalement rien comparés à ce que le film présente dans ses deux versions. Myers est souvent représenté tel qu’il était lorsqu’il était enfant, notamment pour les échanges verbaux avec le fantôme de sa mère, puis déambule à visage découvert, barbu comme un taliban et violent à la manière du Jason Voorhees duquel il était déjà si proche durant le final du film précédent. N’oublions pas que Michael Myers n’est plus du tout le croquemitaine de la saga originale. Désormais il grogne, il crie, il parle même (si le final de la version Director’s Cut ne vous fout pas sur les rotules à ce sujet, c’est que vous êtes vraiment inébranlables !), mais surtout, on ne sait plus du tout pourquoi il tue. Quel est son but ? Ou quel est celui de sa mère ? Aucune idée… Et lorsque Laurie sombre à son tour dans la démence et commence à voir elle aussi les apparitions de sa mère (qu’elle n’a pour ainsi dire jamais connu [rappelons-le, puisque Rob Zombie semble l‘avoir oublié]), c’est le spectateur qui se noie dans ce délire. Myers n’est plus le moteur du film mais un rouage d’une machine plus puissante que lui. D’ailleurs, ses victimes ont l’air d’être tirées au hasard, exemple frustrant du manque de crédibilité accordé au scénario (Myers vient jusqu‘à la fête du Capitaine Clegg juste pour tuer Harley, l’amie de Laurie, avant de retourner à Haddonfield, alors que Laurie est à 10 minutes de là ?).

Michael Myers n’est pas content… et nous non plus d’ailleurs.

Reste toutefois une mise en scène d’une splendeur quasi-absolue. Si Rob Zombie a tendance à se perdre dans les rouages de ses scénarios, il est incontestablement un réalisateur de grand talent. Les plans post-mortem de Sheri Moon Zombie valent à eux seuls une ovation. La lumière et les jeux de caméra relèvent d’une perfection pour les mirettes, stupéfaction qui transcende avec les meurtres très graphiques et d’autant plus malsains pour le spectateur (mention aux meurtres de l’infirmière Daniels à l’hôpital, puis de l’associé et de la strip-teaseuse au Rabbit in Red). Rob Zombie parvient à rendre beaux des situations ou environnements dépravés (le traitement presque voyeuriste du corps de Laurie sur la table d’opération à l’hôpital au début du film ; la maison du shériff Brackett est un taudis rempli de posters et de graffitis malvenus, et pourtant les couleurs rendent le cadre particulièrement attrayant), et les litres de sang sur les murs ne font que s’aligner au soin de la mise en scène pour mieux surprendre. La dimension dramatique est également puissante dans le film, la mort est de retour dans le cœur et dans l’esprit de ceux qui ont survécu au carnage : la séquence de dédicace avec le père de Lynda est grandiose, tandis que le shériff Brackett vit, davantage dans la version Producer’s Cut que dans la version salles, une situation tragique qui ne peut que remuer les tripes du spectateur. L’humour est également au rendez-vous, grâce à des interjections carabinées de Loomis à son assistante, et une excellente séquence du shériff Brackett traitant des bas instincts phistoriques de l’homme envers la nourriture mise en parallèle avec les plans de Myers dévorant les boyaux d’un chien.

Finalement, le film brille plus par sa mise en scène que par son scénario…

En deux mots, Halloween II est un film intriguant. Rob Zombie profite enfin des libertés qui lui sont permises pour nous présenter sa vision très personnelle de Michael Myers. Vision qui anéantit ses efforts effectués sur le premier opus mais qui plonge les personnages emblématiques de la saga originale vers une destinée à la fois inattendue et malsaine. La mise en scène irréprochable s’allie à des meurtres d’une violence rare pour couvrir les lacunes d’un scénario qui se perd dans l’allégorie post-mortem et qui gomme les questions vitales nées du final du premier film par un recours facile au rêve et à la supercherie gratuite. Halloween II est beau mais dérangeant, surprenant mais énervant, inévitable mais discutable. Tout le pouvoir de Rob Zombie qui nous invite encore une fois au débat et à l’appréciation (ou non) du public…

Halloween II, le cauchemar n’est (malheureusement ?) pas terminé…

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