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L'ANTHOLOGIE DE MICHAEL MYERS ET DE LA SAGA HALLOWEEN

Halloween 4 : la version de John Carpenter et Dennis Etchison

Les six longues années qui ont séparé Halloween III d’Halloween 4 n’ont pas été vides de rebondissements. Amer quant à l’échec commercial que fut Season of the witch en 1982, le producteur Moustapha Akkad décida tout d’abord de se concentrer sur d’autres projets (Appointment with fear [aka Rendez-vous avec la peur] en 1985 et Free Ride en 1986), laissant la firme dans l’oubli. Parallèlement, le slasher movie a le vent en poupe en ce début des années 80, et les croquemitaines Jason Voorhees et Freddy Krueger règnent en maîtres absolus au box office. En 1986, Akkad sort de sa léthargie et refait appel à John Carpenter pour discuter de la suite des événements. Celui-ci, toujours possesseur des droits de sa franchise avec Debra Hill, accepte d’envisager une nouvelle fois l’idée d’une suite. Et bien qu’Halloween III n’ait pas été à la hauteur des attentes, cela n’a en rien effacé l’envie de Carpenter de faire disparaître pour de bon ce fichu Michael Myers.

À l’époque, après qu’Universal ait participé à la distribution des opus II et III de la saga, c’est Cannon Films qui approcha Carpenter au sujet d’un quatrième épisode. Fort de leur distribution de Massacre à la tronçonneuse 2, le studio espérait fortement convaincre Carpenter de renouer avec son œuvre originale. Pendant un très bref instant, il fut même question d’un cross over entre Michael Myers et Leatherface (le personnage phare de la saga Texas Chainsaw Massacre), mais cette idée n’était vraiment pas du goût de John Carpenter.

Dennis Etchison fut contacté par Debra Hill au début des années 80 pour s’affairer à la transposition écrite de The Fog, après qu’un précédent écrivain, qui s’était attelé à cette tâche, avec choqué Debra en incluant quelques fâcheuses libertés dans le roman, notamment une scène de sexe entre un reporter et des fantômes sur une plage. « Horrible ! Nous n’avons pas beaucoup de temps, et un besoin urgent de quelqu’un pour rattraper ça, et vous nous avez été recommandé « , lui confiait la productrice. Son travail fut couronné de succès, aussi se vit-il attribué la tâche des novélisations d’Halloween II et III, qu’il signa du pseudonyme Jack Martin. « La veille de Noël, j’ai eu un appel de John, qui m’a annoncé que Debra Hill et lui-même souhaitaient que j’écrive le scénario d’Halloween IV. Ce à quoi j’ai répondu que c’était fantastique ! Quelques minutes plus tard, c’est Debra qui m’appelait pour me dire la même chose. J’étais en extase « , se souvient Dennis Etchison. Le projet comptait sur la participation active de Carpenter et Hill. Il fut même question que Joe Dante, réalisateur de Gremlins, se charge de la réalisation.

Dennis Etchison, auteur des novélisations d’Halloween II et III et premier scénariste d’Halloween IV.

Lors d’une entrevue, Carpenter et Etchison discutèrent concrètement du projet. L’un et l’autre décidèrent d’implanter l’histoire 10 ans après les événements du premier film. Michael Myers et le Dr Loomis sont bel et bien morts après l’explosion de la clinique, et le script mettrait en scène Lindsey Wallace et Tommy Doyle, les deux enfants que Laurie Strode avait en babysitting cette nuit-là. Devenus des adolescents, ils ont grandi, mais vivraient toujours à une rue l’un de l’autre. Lindsey n’aurait aucun souvenir des événements du 31 octobre 1978, contrairement à Tommy, qui se fait repousser par les parents de Lindsey à chacune de ses tentatives d’entrer en contact avec la jeune fille. « L’idée était que la ville d’Haddonfield, après ces terribles massacres, aurait banni la fête d’Halloween. Les habitants ne veulent plus reconnaitre en Halloween une fête. Ils n’autorisent plus les masques et les costumes, pas même les friandises« . Une situation post-traumatique qui sera la base d’un scénario très psychologique. « Après 10 ans de répression et de frustration, tout remonte à la surface quand des événements semblent indiquer qu’IL est de retour ». Etchison ira jusqu’à élaborer une esquisse d’affiche flanquée du titre Halloween IV et marquée du slogan « The night HE came home… again  » où l’on verrait Michael Myers surgissant d’un flot de citrouilles en une éruption de flammes orangées.

« Il y avait une séquence d’un débat de la ville pour décider à mains levées si Halloween devait être banni ou non. Et le gérant du drive-in local exprimait son opposition à la la décision d’éradiquer cette fête de Haddonfield, argumentant que les enfants veulent s’amuser et voir des films d’horreur, mais les autres habitants lui répondaient qu’ils ne devraient pas, qu’il serait meilleur qu’ils n’en voient pas. C’est cette idée de répression qui donnera la force au mal qu’on essaye de cacher. Chassez le naturel, il revient au galop. Halloween ayant été banni de la ville de Haddonfield, je pense que l’idée basique et irrémédiable est que si vous cherchez à supprimer quelque chose, cela ne fera que revenir plus fort encore. En cherchant à effacer le souvenir de Michael Myers des mémoires, ils ont par ironie ramené ce dernier à la vie« .

Lindsey Wallace et Tommy Doyle sont de retour 10 ans après…

Dennis Etchison donne plus de détails quant à la trame de son histoire. Hunt, le policier d’Halloween II est maintenant le shérif. Leigh Brackett est également toujours là, tout comme Lonnie, Ritchie et Keith (le trio de garnements du premier film qui malmenait Tommy Doyle). Marion Chambers est également de retour (cette fois sous le nom de Marion Stern) ». Robert Mundy, journaliste dans Halloween II, revient également pour essayer de faire la lumière sur le cas de Michael Myers. Il cherche à interroger les survivants du massacre de 1978, apprend que Laurie Strode aurait quitté la ville et la région après l’obtention de son diplôme en 1979, et en vient même à douter du traitement du Dr Loomis à son patient en clinique avant son évasion. Cet élément incongru de l’histoire se déroule à Smith’s Grove, institut dorénavant dirigé par Marion, qui estime que Michael Myers n’était qu’une conséquence de la folie de Loomis. Une vidéo confiée par cette dernière au journaliste révèlerait des images d’un Loomis particulièrement violent dans ses paroles et dans ses gestes, usant de blâmes continuels sur le jeune Myers, en conséquence du meurtre de sa sœur Judith. L’enfant, encore sous le choc de son geste et de l’image de sa sœur ensanglantée, aurait sous ce manque d’aide contracté un mutisme derrière lequel se dissimule un mal grandissant à l’égard du manque de soutien psychologique du Dr Loomis. Fonctionnant au départ comme un drame de par les conséquences des événements de la décennie précédente, le film se poursuit en thriller lorsque la mort revient rôder dans les rues de Haddonfield. En effet, une enquête est menée sur des phénomènes sanglants lors desquels des victimes sont retrouvées assassinées au couteau.

Un docteur décrit violent, voir responsable de ce que le jeune Myers est devenu…

« L’histoire se termine dans un climat de démence. Une scène très sanglante dans l’enceinte du drive-in, à minuit. Le croquemitaine est là, poursuivant et saignant les gens de toutes parts. Tommy et Lindsey prennent la fuite. Ils se réveillent dans une ferme à l’extérieur de la ville, quelque part dans la campagne, et Lindsey émerge d’un rêve dans lequel tout lui revenait en mémoire, et de ce souvenir apparaît soudain Michael Myers, baissant sur elle sa lame acérée… Ce n’était pas juste un slasher, ce film. Il y avait une vraie philosophie derrière tout ça« .

Entre ces éléments du final à tout de même lieu une séquence assez surprenante, plongeant le film dans le fantastique pur et dur. La police entoure Myers et ouvre le feu sur lui, provoquant un phénomène incroyable : le croquemitaine, au lieu de s’écrouler sous les balles, se mettrait à grandir jusqu’à atteindre la taille démesurée de plus de 3 mètres, se nourrissant de cette violence plutôt qu’en y succombant. Plusieurs véhicules de police explosent et lorsque les flammes et les fumée disparaissent, il ne reste plus aucune trace de Michael Myers… Cet élément surnaturel jugé grossier par les fans ayant lu le script est la fausse note du scénariste. Pour le reste, le traitement d’Halloween IV est plutôt convaincant, inédit, à l’ambiance oppressante et aux rebondissements affinés. Le retour d’anciens personnages est agréable, et une séquence mémorable : celle d’un adolescent de Haddonfield, tout près du drive-in, projeté violemment tête la première contre une citrouille avant d’être frappé à mort par Myers. De manière générale, Myers y est dépeint comme une force de la nature, élément que Carpenter avait maintes fois soutenu dans le film original, et d’une certaine manière dans Halloween II, avec l’intervention du fantastique et de Samhain, ajoutant au croquemitaine le statut de Seigneur de la mort. Le vrai combat n’est pas tant Michael Myers mais d’affronter ses peurs, faire face à ses traumatismes et les dépasser, plutôt que de les enfouir au risque de les voir ressurgir plus terribles encore. Une vision somme toute inédite dans la saga, et dont la charge émotionnelle aura dans un sens servi au cas de Laurie Strode dans le futur Halloween 20 ans après.

Quelques semaines après la rédaction de ce scénario, toutefois, Dennis Etchison eut un appel de Debra Hill, lui indiquant qu’après trop de désaccords, John Carpenter et elle vendaient finalement les droits de la firme et que malheureusement son script n’avait pas été retenu dans l’équation. Moustapha Akkad détestait cette histoire de croquemitaine fantôme, qu’il jugeait trop cérébrale, et souhaitait un retour au slasher de base avec un véritable tueur au couteau. Une dizaine de scénaristes sont venus aborder une nouvelle histoire dans laquelle le tueur d’Haddonfield ressuscitait des flammes. « J’ai perdu l’occasion d’avoir une renommée pour Halloween 4. Mon nom n’apparaît pas au générique bien que j’étais le premier scénariste sur ce projet« . Cet événement marquait la fin de la participation de John Carpenter et Debra Hill à la saga, Akkad confiant alors les rennes du projet à Dwight Little et son ami scénariste Alan B. McElroy, pour faire renaître de ses cendres le tueur d’Haddonfield dans le film que l’on connaît désormais.

(sources et images : Peter Fielding, The Horror Syndicate, The Chive, Halloween daily news)

RETROUVEZ LE SCRIPT D’HALLOWEEN IV PAR DENNIS ETCHINSON EN CLIQUANT ICI.

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