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L'ANTHOLOGIE DE MICHAEL MYERS ET DE LA SAGA HALLOWEEN

LE SLASHER DU MOIS : BODY COUNT (1986)

Lorsqu’on entame le visionnage de Body Count, et bien que le titre soit d’emblée dissuasif de pauvreté, on se rend très vite qu’on n’est pas face à n’importe quel slasher. En effet, le film démarre sur un générique accompagné d’une musique bien spécifique signée Claudio Simonetti (Ténèbres, Suspiria), et qui est rattachée à un autre genre bien particulier : le giallo. L’âge d’or du thriller italien a pourtant quasiment disparu des écrans et des mémoires, mais les producteurs ont l’excellente idée de combiner la force des deux genres pour en tirer le meilleur hybride possible. À savoir un slasher stylisé, ou un giallo vulgarisé, à la convenance du spectateur. Pas de scène d’intro tape-à-l’œil, pas de pastiche parodique (nous sommes pourtant la même année que Jason le mort-vivant ou Weekend de terreur), tout est exposé avec sérieux, même les clichés imparables de ce type de productions (les rapports lubriques entre les protagonistes, les campeurs dans un lieu abandonné et évidemment maudit, le flic bourru, l’éternelle chute de la fille dans les bois…). Toutefois, on note clairement une mise en scène soignée, et surtout une musique qui permet l’immersion habituelle, mêlée à un accent un peu plus sombre qu’à l’accoutumée. En somme, la touche italienne dans un genre purement américain et en déclin depuis le déballage outrancier qui a suivi la sortie de Halloween. Dans ce film signé Ruggero Deodato (metteur en scène des célèbres Cannibal Holocaust et La maison au fond du parc), une bande de jeunes décide de faire du camping près d’un bois du Colorado (amusant, quand on pense que le film a été tourné en Italie), abandonné depuis qu’un vieux shaman ait commis des meurtres quinze ans plus tôt. Alors que les rapports entre les jeunes et la population locale s’enveniment, les disparitions commencent à donner raison aux légendes annonçant le retour du vieil indien diabolique.

Le slasher en déclin saura-t-il renaître grâce au giallo duquel le genre s’inspire ?

À la manière de Carnage en 1981, c’est la violence graphique et la noirceur de l’esprit mystique (voire fantastique) qui feront la force de Body Count. Les soupçons de sorcellerie qu’implique un shaman tueur permettent de bien belles surprises, tandis que les meurtres gratinés promettent eux aussi de beaux frissons. Les clins d’œil issus du slasher porteront sur l’intelligence du recours à la vue subjective, le chemin de croix d’une victime assurée, et sur un dévoilement en bonne et due forme du tueur du film. L’hommage au giallo proposera quant à lui quelques gros plans étouffants, une nudité féminine quasi permanente, et une mise à mort digne de Dario Argento se faisant habituellement spécialité de meurtres à travers une vitre ou un miroir. Tension palpable jusqu’à l’issue de cette malédiction qui aura compté un beau nombre de victimes décimées au couteau, à la machette, au crochet, sans omettre la chute d’une falaise, une mutilation au piège à loup et à la hache, et un coup de poignard en plein dans la gorge ou de machette à travers la tête. Si la seconde partie du métrage est légèrement en dessous du niveau général, la faute à un léger enlisement de l’intrigue sous les déboires un peu stériles des personnages et une accumulation navrante de clichés (l’inefficacité de la police, la voiture qui ne démarre pas), le final promet quand même des coups de théâtre donnant à Body Count une attention que peu de ses congénères méritaient jusqu’à lors, notamment grâce à un affrontement musclé dont le rythme rattrape la fragilité du mobile. Reste aussi un ultime sursaut final qui entretient la légende et laisse une porte ouverte (certes grossière), indiquant que la dominante slasher reste la plus perceptible. Le seul véritable regret restera de ne pas avoir eu affaire à un véritable shaman doté d’un quelconque pouvoir. Le masque jusque-là très bien mis en valeur n’a finalement qu’un impact limité. Ce qui expliquerait sans doute pourquoi le film n’est pas resté bien longtemps dans les mémoires… Mais là encore est-ce peut-être la faute aux distributeurs et à la censure, le film ayant été monté différemment selon les pays de distribution. Particulièrement réduit sur le sol allemand et américain, on ne trouve aujourd’hui de version « uncut » qu’au Japon et en Australie… en format Laserdisc et VHS, qui plus est. C’est dire le mythe qui s’entretient autour de la version intégrale du métrage depuis plus de 35 ans.

BODY COUNT, UN FILM DE RUGGERO DEODATO, ITALIE/USA, 1986

● les + : un thriller stylisé et travaillé, grâce à la touche giallo et une bande son exceptionnelle
● les – :
quelques clichés et des personnages déplorables, sans oublier un titre passe partout et un final malheureusement expéditif du au montage « cut » du film selon ses pays de distribution.
● meilleures scènes du film :
les apparitions du shaman, l’attaque sous la tente, le final dans le chalet
● pires séquences du film :
toutes celles dues à des acteurs finalement assez bidons

Verdict : *****

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